L’Europe telle qu’on l’aime
2 juin 2016 par Pascal Rogard - Weblog
Historique. Il y a peu d’accords professionnels, notamment dans le petit monde de l’audiovisuel, qui ne se voient pas affubler de cet adjectif, quand bien même les sujets traités bien loin de la Politique au sens noble et de l'intérêt général ne sont que de misérables tractations commerciales .
Gardons-nous donc de qualifier ainsi les annonces faites par la Commission européenne la semaine dernière visant à réformer la directive sur les services de médias audiovisuels à la demande. Mais, ne boudons pas notre plaisir face à des propositions qui vont dans le bon sens et qui devraient renforcer la promotion et le financement des œuvres européennes sur les plateformes en ligne.
Une fois n’est pas coutume, la Commission européenne a su écouter les créateurs européens et les pays comme la France qui déploraient depuis longtemps que l’Europe, si riche de sa diversité et de ses talents, se résigne à laisser prospérer un dangereux nivellement par le bas des services culturels.
Une concurrence totalement déloyale et scandaleuse était en train de s’installer durablement entre des chaînes de télévision qui payent normalement leurs impôts, contribuent à l’abondement des comptes de soutien à la création quand ils existent, investissent et diffusent les œuvres européennes et des plateformes de vidéo à la demande détenues par des géants mondiaux qui se délocalisaient pour mieux s’exonérer de toute obligation.
A terme, les politiques culturelles étaient mises en danger par de telles distorsions, au profit d’un moins-disant culturel qui faisait saliver les puissants groupes d'intérêt pour lesquels la diversité culturelle n’est qu’une obscénité et une survivance du passé.
Bien souvent, les sirènes des GAFA ont résonné avec gourmandise et délice aux oreilles de responsables européens, émerveillés par les promesses d’une fausse modernité et aveugles à cette optimisation fiscale qui appauvrit les peuples européens.
Cette fois-ci, la petite voix de la raison et de la création semble avoir trouvé des échos plus favorables dans les hautes sphères de la Commission avec notamment 2 propositions clés : la présence minimale dans les catalogues des services à la demande d’une proportion minimale d’œuvres européennes (même si le taux proposé de 20% est assez ridicule et devra être renforcée car il est très en deça de ce que pratiquent déjà la plupart des plateformes) ; la possibilité donnée aux Etats de pouvoir soumettre les fournisseurs de services de VàD qui proposent leurs offres sur leur territoire à des obligations de financement de la création, proportionnellement au chiffre d’affaires qui y serait réalisé.
Avec cette politique de soutien à la création assumée et l’application du principe de destination pour éviter le contournement des règles nationales, l’Union européenne se doterait enfin d’outils efficaces pour que tous ceux qui distribuent des œuvres contribuent à la diffusion de la création européenne et participent également à son financement.
Le processus sera encore long, les embûches seront nombreuses, entre un Conseil européen où certains pays se sont déjà faits les relais fidèles des entreprises américaines du Net et d’une dérégulation à tout crin et un Parlement européen qui devra aussi défendre, comme il l’a déjà fait à de nombreuses reprises, les créateurs européens.
Mais, le mouvement est au moins enclenché et il devra aller loin, dans l’amélioration de la disponibilité des œuvres, dans le renforcement du financement de la création, dans l’application partout en Europe d’une juste et proportionnelle rémunération pour les auteurs.
Il faut être ambitieux et audacieux car on le sait, l’Histoire, la vraie, ne repasse jamais les plats.
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Commentaires (6)
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Je trouve pas du tout pertinent cet impôt Européen culturel, je suis abonné à Netflix et j’espère surtout des programmes US pas des séries sans intérêt type Marseille. Tout l’argent perdu par Netflix à payer des trucs sans intérêt juste parce qu’ils sont Européen c’est juste du protectionnisme qui va baisser la qualité des programmes diffusés par Netflix et n’apportera que du piratage en plus.
Si l’Europe veut un grand site type Netflix les chaines Européenne devraient se regrouper et produire des séries intéressantes plutôt que de niveler tout le monde par le bas (on voit déjà l’efficacité Française à l’oeuvre avec la chronologie des médias).
Sans compter les dégâts collatéraux possible sur des sites comme ADN/Wakanim/Drama Passion.
A cause du piratage on nous propose de moins en moins de séries en DVD et en Blu-Ray et vous voulez tuer le seul site intéressant (pas la peine d’évoquer la blague qu’est Canalplay).
Mêler vous donc de vos affaires en commençant par réglementer enfin le piratage (pas avec votre blague HADOPI-esque ou en voulant tuer la stabilité du net avec du filtrage).
Je ne suis pas certain qu’assurer la continuité des diffusions obligatoires sur le réseau, comme elle l’a été du temps de la télédiffusion, soit une bonne chose: Cela fait des décennies que l’on fait des séries pour la plupart de mauvaise qualité et qui ne sont pas diffusées ailleurs car les adapter ne tente personne. Sans doute la faute à ces obligations de diffusion forcée qui n’incitent pas trop à se sortir les doigts du c.. pour chercher un succès qui se fasse naturellement. Si Netflix et autres avaient un débouché commercial réel pour ces séries qu’on veut leur imposer, ils iraient déjà les acheter sans qu’on n’ait besoin de les y obliger!
Au final, c’est les consommateurs qui ne demanderont jamais ces contenus (sur un site de VoD, ça risque d’être dur pour vous, mais on a par définition le choix!) qui paieront ce nouvel impôt déguisé (car Netflix répercutera) par une augmentation des abonnements européens, ce qui va en effet comme vous le dites « appauvrir l’Europe »… et comme toujours au profit des habituels rentiers de la culture.
Si cela devait faire trop mal, ce sera des résiliations et un retour aux torrents et autres. C’est d’ailleurs déjà sans doute le cas, quelques euros/mois dans une seedbox à l’étranger accédée de manière chiffrée, les gens savent comme vous calculer: J’observe un retour en grâce dans mon entourage depuis quelques temps.
Car sur un réseau internet, il n’est pas possible de bloquer grand chose en réalité (sauf à interdire le chiffrement et donc le commerce en ligne: Bon courage!), surtout quand des pays migrent d’un modèle économique de paradis fiscal avec le tour de vis post 2008 à celui de paradis numérique… assurant ce faisant le financement de leur infrastructure en attendant les chamboulements des devises électroniques en gestation qui leur permettront de revenir à leur sujet en position incontournable: On s’appauvrit dans l’immobilisme à préserver des dinosaures, d’autres bougent et s’adaptent.
L’échec d’Hadopi en atteste. Mince, on a encore « appauvri » nos contrées avec une digue face à un ras de marée.
L’enregistrement (audio puis video) a permis au secteur de vivre en rentier tant que les moyens de copie/stockage sans perte n’étaient pas accessibles à tous. Cette époque est finie!
Et vous n’avez pas encore vu la révolution de l’impression 3D qui arrive! Copier des bits c’est bien, les transformer en pièces/objets va tuer d’autres secteurs qui escroquent le monde et l’appauvrissent: De l’obsolescence programmée d’une pièce mécanique fragile que l’on pourra refaire aux implants dentaires… exemples parmi une infinité.
Le futur sera open-source et méritocratique.
Ce que vous dites est la négation de toute politique culturelle.
Laissons la main invisible du marché agir et tout sera pour le mieux.
Au pire, on ne subventionnera plus des incapables… dont personne ne veut hors contrainte de diffusion.
La main invisible a bon dos, surtout quand c’est des baffes qui se perdent!
J’aurais un question quota et Brexit.
Hélas il existe des quotas de diffusion à la TV (et maybe sur Internet), les films Anglais et Series Anglaises font partie des quotas que va t’il se passer si l’UK quitte l’Europe tous les programmes Anglais largement diffusés (et en général vachement bien) vont il sortir des quotas ?
Merci
Il est trop tôt pour répondre mais sauf négociation contraire les films GB ne devraient plus être inclus dans les quotaseuropéens