Mars Attacks
23 mars 2014 par Pascal Rogard - Weblog
Il ne se passe pas un jour sans que l'arrivée probable de Netflix en France ne fasse l'objet d'un article ou d'une déclaration d'un responsable de médias .
Belle revanche pour un loueur de vidéos physiques qui a su progressivement transformer un modèle économique "old fashion" pour développer son métier en s'appuyant sur les ressources de l'Internet qui permettent instantanément de délivrer des programmes sur une large échelle.
Ce fracas médiatique a de quoi énerver les opérateurs français qui font la même chose sans bénéficier d'une telle couverture de presse.
Mais telle est la règle, les " over the top " américains ont la cote, incarnent le glamour et leur moindre déplacement est scruté à la loupe comme le serait celui d'une star hollywoodienne .
Le cas Netflix illustre parfaitement l'incroyable agilité de ces sociétés qui défient les vieilles règlementations fondées encore sur la taxation des portes et fenêtres alors que celles ci dans l'univers numérique n'ont jamais existé.
Depuis que les Collin et Colin ont finement décrypté à la demande d' Arnaud Montebourg les mécanismes de la concurrence déloyale faite aux opérateurs nationaux et les distorsions fiscales engendrées dans cette passoire qu'est l' Union européenne rien ou presque n'a été fait .
La France a posé le problème mais la vitesse de l'Europe c'est celle de la tortue romaine, inadaptée au nouveau monde .
Neflix arrive mais iTunes est déjà là et nul ne s'en est ému car la VàD à l'acte se substitue à la vidéo physique dont les éditeurs hormis une légère contribution au CNC et une insertion dans la chronologie des médias ne supportent aucune contrainte de financement à la création et ne respectent même pas la loi fixant au bénéfice des auteurs une rémunération proportionnelle au prix payé par le public.
Si Netflix fait tant jaser c'est que la télévision par abonnement qu'il s'agisse de Canal plus ou dans une moindre mesure d'Orange cinéma séries est au cœur du processus de financement du cinéma français .
La concurrence n'est pas frontale , mais l'atteinte à l' exemplarité serait d'autant plus forte que 3 des frères de la télévision française TF1 M6 et Canal plus s'en sont déjà émus plaidant pour un assouplissement de leurs propres règles et demandant un alignement sur le régime de l'opérateur le plus favorisé et donc des créateurs les moins défendus.
Face à cette menace que font les détenteurs de droits français ?
Ils vendent, ils vendent ... tout en demandant aux autorités publiques de tout faire pour que soit respectées les règles en vigueur sur notre territoire.
Confrontés à des situations analogues lors de la création de Canal plus puis de l'arrivée de la très berlusconienne 5 leurs glorieux ainés, la race des seigneurs de la production, épris d'indépendance mais solidaires lorsque des intérêts vitaux étaient en jeu gelèrent les négociations commerciales et imposèrent à André Rousselet de renégocier un décret pourtant publié démantelant la chronologie des médias pour faire de la chaîne à péage la "voiture balai" du cinéma en salles .
De même la première 5 version western spaghetti du faire face à un blocus et à des actions juridiques qui in fine aboutirent à une décision du conseil d'Etat annulant la partie cinéma du cahier des charges et empêchant toute diffusion d'œuvres cinématographiques.
Aujourd'hui rien de tel , la balkanisation de la profession se conjugue avec l'absence de leadership pour qu'aucune réponse adéquate et crédible ne soit apportée rendant possible une réaction collective indispensable pour la préservation du modèle français.
Aurélie Filippetti qui a tout compris des enjeux a pu le constater vendredi dernier après avoir réunis FAI puis producteurs et diffuseurs.
Espérons qu'elle saura trouver les voies et moyens de préserver l'avenir du cinéma français et de la création audiovisuelle malgré ceux qui les font car il arrive heureusement que des politiques aient encore intactes une forte capacité d'indignation et une volonté d'agir.
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Commentaires (1)
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Un FAI n’aurait jamais dû se retrouver à vendre du multimédia dans du triple-play.
Ils feraient mieux de se concentrer sur leur coeur de métier à eux, afin que nos débits moyens qui n’ont quasiment pas évolué depuis le tournant de ce siècle (14 ans, une éternité!) arrêtent de faire rire un pays comme la Corée, encore sous-développé il y a 20 ans mais désormais largement fibré. Ce qui permet de développer le business autour du réseau tandis que notre ADSL antédiluvien réussit l’exploit de faire bien pâle figure par rapport… aux réseaux mobiles: Ahurissant!
Peut-être que l’on aurait aussi pu dégager les synergies (aujourd’hui éparpillées dans le pôle média de chaque FAI) nécessaires à l’émergence d’un Netflix français conquérant, si chacun s’était contenté de bien faire son métier.
Au final, on va encore se faire bouffer et notre production qui ne vit que de subventions (officielles et cachées, a travers le régime d’assurance chômage détourné par les producteurs) est un puits sans fond: Dernier épisode en date, on en est à taper dans les primes de départ des cadres alors que leur régime de retraite est largement excédentaire… Pour gagner une à deux centaines de millions sur le dos de la prime de risque calculé du changement d’emploi (dont on peut pronostiquer la fin, avec une perte de mobilité d’une catégorie qui jusque là plus dynamique que les autres)… afin de financer des régimes ou la gabegie se compte en milliards comme celui du spectacle.
Aurélie n’aura pas le temps de réviser ses comptes afin de tout compter. Trop étant trop, elle dégage avec le reste. Seul reste le « chef d’escadrille »… arrivé sur l’éjection de Sarko et qui nous colle son clone Valls en 1er ministre, juste car il est le moins pire devant l’applaudimètre!
Avec un tel niveau de bon sens politique, vous n’avez qu’a souffler et la girouette tournera. Mais vous ne ferez que prolonger l’agonie en criant haro au Netflix et aux autres pendant que les gens téléchargent Game Of Thrones et autres depuis des années, dont l’envergure dépasse tout de même un petit peu « Joséphine ange gardien » et autres productions hexagonales dont personne ne veut, même a l’oeuil sur Pirate Bay et consors!
Il y a un moment ou il faut aussi se demander pourquoi cela arrive. Et si le niveau de notre production n’y serait pas pour quelque chose.